Il y a deux mois, l'Aquarius, ce navire de l'ONG SOS Méditerranée spécialisé dans le transport de migrants depuis la Libye, avait créé l'événement et provoqué une mini-crise diplomatique en contraignant les pays européens à préciser leur position sur l'accueil des migrants. L'Italie, par les paroles fortes de Matteo Salvini, avait déclaré ses ports fermés et demandé aux autres pays européens d'assumer leurs responsabilités – ou leur hypocrisie. On se souvient de la gesticulation-palinodie d'Emmanuel Macron, donnant des leçons à l'Italie tout en refusant d'accueillir le navire, pour finalement accepter 75 migrants et, par le truchement de Martine Aubry, l'arrivée de 42 Soudanais à Lille - Soudanais qui obtenaient immédiatement leur statut de réfugiés, le 3 août dernier. Ce n'était plus du « en même temps », c'était du grand n'importe quoi.

L'occasion avait également été saisie par le nouveau Premier ministre socialiste espagnol pour se propulser sur la scène européenne avec le masque de la gauche idéologue pro-immigration. Résultat de ce tango : avec l'inconscience de Pedro Sánchez, digne élève de l'Angela Merkel de 2015, la « route » de l'Espagne est submergée, notamment à Ceuta et Melilla. Quant à l'Italie, au contraire, le Premier ministre Giuseppe Conte s'est félicité d'une forte baisse des débarquements de migrants sur ses côtes italiennes : -85 % par rapport à juin-juillet 2017 !

Et la France, dans tout ça ? Ballotté entre l'affaire Benalla et l'affaire Kohler, on aurait pu penser qu'Emmanuel Macron, installé à Brégançon, ait au moins pris le temps de lire Le Camp des saints, dont l'action ne se déroule pas si loin de sa piscine avec vue sur la Méditerranée. Histoire de sortir de cette hypocrisie du ni-ni, ou du en même temps, qui se traduit en fait par l'arrivée d'une forte proportion des migrants de l'Aquarius en France.

Cette fois-ci, l'Aquarius a recueilli 141 migrants dans les eaux libyennes et nous refait son coup de com' et de chantage. L'Italie a redit sa position par la voix de Matteo Salvini :

« Ce navire est allemand, loué par une ONG française, naviguant dans les eaux maltaises, avec un équipage étranger et avec le pavillon de Gibraltar. Il peut aller où il veut , mais pas en Italie ! Stop aux trafiquants d'êtres humains et à leurs complices. #Ports fermés. #Cœurs ouverts !»

Il faudrait méditer tout ce qui est dit dans ce tweet. Et entendre la détermination qui anime son auteur. Entendre aussi le soutien populaire dont il bénéficie. N'en déplaise à l'ONG belge dont j'ai oublié le nom et à MM. Griveaux et Mahjoubi, je ne pense pas que ce soit des agents russes qui « likent » ou « retweetent » les messages de Matteo Salvini. Il se pourrait même qu'il y ait beaucoup de Français.

Savez-vous qui a proposé d'accueillir l'Aquarius ? Le port de Sète, dans l'Hérault ! Ou, plus exactement, son président, Jean-Claude Gayssot, communiste historique âgé de 74 ans, ancien ministre des Transports dans le gouvernement Jospin il y a vingt ans. Avec une condition, d'après Midi libre : "Seulement si le gouvernement français se charge des migrants." Il y a deux mois, c'était les nationalistes corses qui nous avaient fait le coup de la générosité facile sur le dos des autres. Et la prochaine fois, ce sera qui ? Alain Juppé invitant l'Aquarius dans le port de Bordeaux ?

Allô, la France ?

L'Élysée a fait savoir, dans la soirée, qu'Emmanuel Macron "suivait en temps réel la situation en Méditerranée". Une idée, pour la prochaine « carte postale » qu'il nous envoie quotidiennement de son lieu de vacances : et si l'Aquarius débarquait directement à Brégançon, elle serait pas belle, la carte postale, avec 42 ou 43 migrants autour de la piscine ?

Juste une condition : un délai de deux heures pour que le Président finisse Le Camp des saints.

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13 août 2018 à 21:15

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