On n'est plus chez Corneille, où le héros s'arrache au dilemme par un effort de sa volonté. Non, on est chez Racine : les issues sont fermées et les personnages ne peuvent que mourir à la fin. La France, en passant de De Gaulle à Macron, est tombée de Corneille en Racine. De Gaulle l'avait arrachée à l'impuissance institutionnelle de la IVe République et d'une manière cruelle au drame algérien, mais cinquante ans plus tard, si les institutions créées par le Général, même modifiées, garantissent théoriquement la durée d'un pouvoir constitutionnel, celui-ci est prisonnier d'une impasse qu'il faut écrire au pluriel et qui ressemble à une table gigogne.

La plus petite faisait s'extasier Castaner, tout fier de lui puisque 89.000 gendarmes et policiers, à pied, à cheval et en voiture, avaient contenu les manifestations des gilets jaunes. Les forces de l'ordre n'avaient pas été débordées. Il n'y avait aucun mort à déplorer. Mais notre "État de droit", paralysé depuis Malik Oussekine, non content d'avoir multiplié des arrestations arbitraires et des gardes à vue abusives, avait surtout accepté que des biens soient saccagés, pillés, brûlés, que leurs propriétaires soient lésés, spoliés, dépossédés de leur outil de travail, comme si la première mission de l'État n'était pas de garantir la sécurité et la propriété des citoyens et des contribuables mais de protéger la vie des casseurs. C'est l'impasse de la sécurité de plus en plus coûteuse et prolifique en hommes et en moyens, efficace quand elle s'exerce à l'encontre d'honnêtes gens un peu turbulents, mais de moins en moins performante quand elle se heurte à de vrais voyous.

Les honnêtes gens un peu turbulents, ce sont les gilets jaunes, comme ceux qui ont passé une journée dans un commissariat alors qu'ils n'avaient pour arme qu'un masque de travail pour se prémunir des gaz lacrymogènes. Au début, ils voulaient moins d'impôts. Maintenant, ils veulent plus de pouvoir d'achat. Ce n'est pas tout à fait la même chose. Certes, moins d'impôts, c'est plus d'argent laissé au contribuable, mais s'il s'agit d'augmenter les salaires, les pensions, les primes, comme s'il ne s'agissait que d'une décision politique, on se trouve confronté à une seconde impasse qui est celle de la compétitivité. Le rouleau compresseur du socialisme est passé à plusieurs reprises sur notre pays, en diminuant le temps de travail, en créant des emplois superflus dans le secteur public, en alourdissant la dépense publique et en augmentant la pression fiscale. Le résultat global est terrifiant : la France n'a cessé de reculer et de s'endetter, le chômage de croître, l'industrie de s'effondrer, les services publics de plus mal fonctionner. Le déficit de notre commerce extérieur traduit cette perte de compétitivité.

On attend maintenant du "Président" une sorte de sortie de crise à la façon des accords de Grenelle en 1968. Or, et c'est la troisième impasse, celle de l'euro, la dévaluation est désormais interdite. La perte de compétitivité est sans retour. Les dépenses non gagées sont des dettes dont il faudra payer les intérêts. Macron avait le choix d'instaurer la TVA sociale, qui est une manière d'accroître la compétitivité sans dévaluer. Il a choisi la CSG : lourde erreur qui signe son appartenance à la gauche, gauche de luxe qui supprime l'ISF, mais gauche néanmoins qui massacre les classes moyennes et se moque de l'avenir d'une nation qu'il verrait bien disparaître dans un grand tout européen.

Or, cette Europe, particulièrement celle de l'Ouest, vieillissante, a décidé mollement de s'ouvrir au monde et de compenser par l'immigration sa faible natalité, le délabrement de ses familles, et de peser aussi, l'air de rien, sur les exigences excessives de ses ressortissants en matière de rémunérations. Elle va aller, plus ou moins discrètement, à Marrakech signer le pacte de l'ONU sur les migrations. Est-on à ce point aveugle qu'on ne voit pas d'où viennent les casseurs qui sont dans le sillage des gilets jaunes ? Des quartiers dans lesquels l'assimilation ne fonctionne plus et où notre pays produit sa propre barbarie interne. C'est là la quatrième impasse, et elle est mortelle !

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10 décembre 2018 à 9:19

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