Après une éclipse du paysage politique que l'on aurait espérée plus longue, voire définitive, Jean-Louis Borloo fait à nouveau parler de lui. Et là, il n'est plus question d'électrifier l'Afrique, mais carrément de sauver nos banlieues et nos quartiers difficiles. Cette tâche, qui promet d'ailleurs d'être au moins aussi difficile que la première, n'est pas nouvelle pour ce centriste à géométrie variable puisqu'il s'y était attaqué au début des années 2000 alors qu'il était ministre d'un certain Jacques Chirac.

C'est à Tourcoing, à quelques kilomètres seulement de Valenciennes, ville administrée pendant treize ans par Jean-Louis Borloo, que Macron avait annoncé son intention de remettre en selle l'ancien président du Parti radical. Il est vrai que ce dernier avait officiellement pris position en faveur du candidat "En marche" lors de la dernière présidentielle, n'hésitant pas à déclarer qu'il était prêt à "se retrousser les manches" pour lui.

Ainsi, chargé d'aider le gouvernement d’Édouard Philippe dans la réalisation de son plan pour les quartiers difficiles, Borloo s'apprête à remettre au chef de l’État, d'ici quelques semaines, un rapport dont une des préconisations phares, à côté de la création d'un corps de hauts fonctionnaires issus des quartiers sensibles, est un investissement de 48 milliards d'euros ! Pour qui connaît l'ancien député du Nord, cette recommandation n'a rien de très nouveau. En effet, alors qu'il était en charge de la politique de la ville aux côtés de Jean-Pierre Raffarin, Borloo avait déjà imaginé un plan de sauvetage de nos banlieues pour un montant de 46 milliards. On le constate, malgré les tensions budgétaires que connaît notre pays, l'électricien de l'Afrique ne recule devant aucun sacrifice pour dépenser l'argent du contribuable.

Face à ce projet, certes généreux, mais complètement utopique, Borloo s'est-il posé la question de l'énormité de ses propositions. A-t-il mesuré que la somme de 48 milliards représenterait 141 % de l'actuel budget de la Défense. Ou bien encore trois fois et demie le budget consacré à notre sécurité intérieure ? Tout cela pour des résultats que la Cour des comptes ne cesse, depuis de nombreuses années, de remettre en cause, dénonçant la gabegie qui a entouré systématiquement toutes les politiques urbaines élaborées au cours des dernières décennies. Mais il est vrai que certains politiques ne font bien que ce qu'ils savent bien faire. Dépenser inconsidérément l'argent public fait véritablement partie de ces dons attribués à Borloo, lequel n'a jamais cessé, au cours de sa carrière politique, de le mettre en œuvre sans jamais se poser la question du résultat. Ainsi, son action en tant que ministre de la Ville, malgré d'importants investissements, s'est-elle révélée peu concluante. Cette démarche pour le moins dispendieuse démontre, une fois encore, que Macron n'innove en rien dans sa façon de gouverner et d'aborder les grandes difficultés que connaît notre pays. Il s'apprête, comme ses prédécesseurs, à acheter une relative paix sociale dans les quartiers difficiles à coups de milliards d'euros sans vouloir traiter, au préalable, les questions de fond. Un fois encore, c'est le contribuable français qui devra supporter le poids financier de réformes bâclées, sans vision d'avenir et, par avance, vouées à l'échec.

Dans ce contexte, les profiteurs du système et autres dealers de rue ont encore de beaux jours devant eux. À eux la création d'associations bidon et autres pompes à financements publics. À ceux qui se lèvent tôt le matin pour aller travailler, les augmentations d'impôts et le serrage de ceinture. Bienvenue dans l'ère Macron !

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10 avril 2018 à 16:49

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