Garde partagée : le jugement de Salomon

Un petit nombre de pères, s’étant vu refuser la garde de leurs enfants et ayant essuyé le même refus devant leur demande de garde alternée, ont réussi à intéresser à leur cause suffisamment de personnalités du monde politico-médiatique pour que le MoDem ait réussi à faire débattre, ce 30 novembre, d’un projet de loi visant à faire de la garde et de la résidence alternées le mode normal de garde.

Les inconvénients de ce mode de garde sautent cependant aux yeux :

- L’hébergement alterné exige que, chez les deux parents, les enfants trouvent le confort auquel ils sont habitués : les conditions précaires acceptables pour une fin de semaine par mois ou une quinzaine par an ne le sont pas pour des séjours plus longs et fréquents. Beaucoup de parents - la majorité, sans doute - n’ont pas les moyens de le leur assurer.

- Les deux domiciles doivent être assez proches l’un de l’autre pour que les enfants ne voient pas leur scolarité interrompue à chaque changement de résidence et aussi pour que les trajets ne soient pas trop longs (ni trop coûteux) ; cela exige que les activités professionnelles des deux parents s’exercent dans une relative proximité ; mais, même s’il en va ainsi au moment du divorce, peut-on garantir qu’il en sera toujours ainsi ? Diverses autres circonstances peuvent aussi exiger que l’un des parents déménage pour une région éloignée ou pour un pays étranger…

Mais plus graves sont les inconvénients d’ordre psychologique : on sait qu’avant six ans, le petit enfant a le plus grand besoin de stabilité, dans un cadre auquel il est habitué et auprès de la personne à laquelle il est le plus attaché, c’est-à-dire dans neuf cas sur dix sa mère, que le meilleur des pères ne peut pas remplacer pendant cette période. Mais même plus âgés, les enfants peuvent être perturbés par ces perpétuels changements de cadre et de méthodes d’éducation. À plus forte raison si l’un des parents (ou les deux) forment un nouveau couple avec un tiers souvent mal supporté par leurs enfants.

La motivation d’une telle loi est exclusivement la satisfaction d’un droit qu’auraient les pères à l’égalité dans leurs rapports avec leurs enfants. Ses promoteurs ne dissimulent pas qu’en en faisant une option que le juge doit envisager dans tous les cas, ils parviendront à transformer l’opinion des psychologues qui "estiment que l’enfant est perturbé s’il a deux maisons, deux chambres, etc. En imposant les choses par la loi, cela permet de changer les mentalités", si l’on en croit Caroline Elkouby Salomon, avocat au barreau de Paris et spécialisée en droit de la Famille.

En somme, les promoteurs d’une telle loi, qui n’aurait d’intérêt que pour un petit nombre d’adultes, traitent les enfants comme un gâteau qu’il faudrait partager en parts égales. Salomon, au secours !

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