Emmanuelle Ménard réagit aux propos du président de l'Assemblée critiquant l'absentéisme des députés. Or, c'est le groupe LREM qui a mis en place ce système ! "Moi, je n'ai aucun remplaçant."

"Mais c'est un vrai problème pour un député qui, comme moi, veut bien faire son travail (commission, réunions, questions, etc.) et qui a sa circonscription loin de Paris."

"Mais l'absentéisme tel qu'il a été posé pour les votes solennels est un faux débat."

Emmanuelle Menard, ce week-end François de Rugy a fustigé l’absentéisme des députés. On a bien compris qu’il visait surtout ceux de sa propre majorité. Est-ce que vous êtes d’accord avec le président de l’Assemblée ? A-t-il eu raison de réagir ainsi ?

Je ne sais pas s’il a eu raison de réagir publiquement. C’est quand même le député du groupe La République En Marche qui a instauré un système de tournante et de permanence tournante. Ils ont divisé leur groupe en trois et leurs députés ont l’obligation d’être présents une semaine sur trois. C’est quand même bizarre que ce soit justement quelqu’un de cette sensibilité-là qui critique le système qu’ils ont eux-mêmes mis en place.
Je vous rappelle que moi, je suis présente toutes les semaines dans l’Hémicycle. Il n’y a personne qui me dit que j’ai le droit de m’absenter pendant quinze jours.
Je trouve que c’est un peu facile de critiquer l’absentéisme des députés en général, alors que le groupe En Marche a été le premier à mettre en place ce système.

La députée Claire O’Petit de La République En Marche a vertement critiqué le président de l’Assemblée en disant que c’était un moyen de se mettre en avant sur le dos des députés. Partagez-vous ces propos ?

Je ne sais pas s’il a parlé trop vite et s’il n’a pas trop réfléchi avant de parler qu’il allait s’attaquer effectivement à sa propre majorité.
Quoi qu’il en soit, il y a un vrai problème d’organisation au sein de l’Assemblée. Lorsque l’Hémicycle est aux trois-quarts vide, si ce n’est pas plus, alors que l’on discute de certaines propositions de loi, les Français sont interpellés. Cela cautionne les propos soutenant que les députés sont payés à ne rien faire.
En réalité, c’est aussi un problème d’organisation. Certains députés sont absents et ne fichent pas grand-chose à l’Assemblée. C’est évident ! Je ne vais sûrement pas prendre leur défense.
En revanche, si je prends mon cas, par exemple, cet après-midi, je suis censée être dans l’Hémicycle pour défendre les amendements que je propose sur la protection des données personnelles. Mais en même temps à 17 heures, j’ai une réunion obligatoire de ma commission des affaires économiques. Cette réunion m’intéresse, en plus, puisqu’elle concerne le logement, un sujet qui intéresse beaucoup ma circonscription. Je n’ai pas envie d’être absente, mais je n’ai pas le don d’ubiquité. Comment suis-je censée faire pour être à la fois en commission et dans l’Hémicycle ? Je vais devoir jongler en suivant les travaux dans l’Hémicycle pendant que je suis dans la commission pour pouvoir au moment venu, quand je vois que mon temps de parole approche, me rapprocher de l’Hémicycle et revenir ensuite en commission en espérant que mon temps de parole en commission ne sera pas passé en même temps.
Effectivement, il y a probablement des choses à revoir. Je comprends que certains aient envie de revoir le fonctionnement et l’emploi du temps de l’Assemblée. Je pense qu’il y a sûrement des moyens un peu plus rationnels de travailler.
Quand on est comme moi un député dont la circonscription est loin de Paris, une fois à Paris, je n’ai que cela à faire. Mais à Paris, je ne suis pas sur ma circonscription.
Je dirais que l’absentéisme tel qu’il a été posé et surtout l’absentéisme pour les votes solennels est un faux débat. Cela mérite une remise à plat de la façon de travailler des députés et la redistribution des rôles entre la présence dans l’Hémicycle, dans les commissions et en circonscription.

Votre collègue François Ruffin, des Insoumis, a critiqué l’absence de débat au sein de la majorité qu’il a qualifiée de « députés robots », parce que ces députés voteraient sans débat et sans réfléchir et entérinaient tout ce que proposait le Président. Partagez-vous cette analyse ?

On a souvent l’impression que ces votes se font effectivement le petit doigt sur la couture du pantalon et qu’il n’y a malheureusement pas beaucoup de place pour la discussion.
Maintenant, je ne fais pas partie du groupe En Marche. Je sais qu’ils ont beaucoup de réunions de groupe, auxquelles, par définition, je ne suis pas invitée. Je ne sais donc pas quel est leur mode de fonctionnement en interne.
Il est vrai que parfois lorsque le ou la ministre s’exprime, c’est son avis qui prime même si les rapporteurs de La République En Marche ne sont pas d’accord avec lui. C’est un peu dérangeant. Ça fait un peu chambre d’enregistrement.

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07 février 2018 à 17:54

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