Marine Le Pen, députée de la nation, élue d’une région populaire et, accessoirement peut-être, finaliste de l’élection présidentielle avec près de onze millions d’électeurs, aurait aimé assister aux funérailles de Johnny Hallyday. Sans doute parce qu’elle aime Johnny. Peut-être aussi, et surtout, parce que lorsqu’on représente des millions de Français, on se doit de les accompagner dans leurs peines comme dans leurs joies. Mais la famille du chanteur s’y serait opposée. Sans explication. On devine un peu pourquoi.

On me dira qu’après tout, la famille est libre de choisir qui elle souhaite voir assister aux obsèques de son cher disparu. Mais cette cérémonie n’avait rien - c’est le moins que l’on puisse dire - d’une cérémonie dans l’intimité familiale…

Et, du reste, Johnny appartient-il encore à sa famille ? Quand Johnny ne s’appartenait plus vraiment. Quand trois chefs d’État, deux émérites, un en charge, assistent aux funérailles ? Quand le Président de tous les Français, pour reprendre la formule consacrée, prononce l’éloge funèbre – et le fait très bien – sur le parvis de l’église de la Madeleine. Quand ministres, président du Sénat, vice-président de l’Assemblée nationale se pressent au premier rang dans l’église. Quand la police nationale escorte - soyons mesquin deux secondes, on imagine, aux frais de la famille ? - le défunt dans son ultime voyage à travers les rues de Paris. Quand, à défaut d’hommage national, c’est un hommage populaire qui est rendu au chanteur. Quand Johnny, tout simplement, appartient à tous les Français, à la France.

J’entends d’ici l’argument cent fois balbutié, répété mécaniquement, à l’envi, comme une mauvaise rengaine : ce n’est pas les électeurs du Front national que l’on exclut de la pompe funèbre, c’est le Front national, ses responsables et, évidemment, la famille Le Pen, frappée d’une malédiction digne de celle des rois maudits. Un argument qui fait fi de l’éventuelle blessure que cela peut provoquer chez ceux qui n’ont pas le cuir tanné comme Mme Le Pen. Un argument éculé qu’on avait entendu, du reste, en 2015 au moment de la grande manifestation après l’attentat de Charlie. Un argument qui sent son pharisien, fidèle bien comme il faut du temple de l’entre-soi. Un argument qui laisse entendre que des millions de Français sont de pauvres malheureux que l’on trompe, des brebis égarées pour lesquelles on prie afin qu’elles reviennent un jour au bercail. L’argument, finalement, de ceux qui méprisent le peuple. Un peuple pour qui Johnny chantait, sans demander à l’entrée de la salle de spectacle pour qui il votait ou s’il votait, d’ailleurs.

Ce devait être un jour de communion. Mais, visiblement, l’excommunication, c’est un truc qui marche encore dans l’Église de l’entre-soi…

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09 décembre 2017 à 19:17

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