La dernière idée du gouvernement – qui, paraît-il, aime les entrepreneurs - est de leur faire payer les arrêts maladie des salariés. Actuellement, ces derniers sont pris en charge par la Sécurité sociale dès le 4e jour d’arrêt, à hauteur de 50 %. Le coût faramineux de cette protection plombe les comptes publics à tel point que le pouvoir, jamais en peine de trouver des gisements d’économies, souhaite en transférer la charge sur les employeurs, au moins pendant huit jours. On sait ce que cela signifie pour la suite.

Cette proposition est stupéfiante. En premier lieu parce que les entreprises paient déjà une partie des arrêts maladie. Non seulement de façon indirecte, par les cotisations patronales assises sur le salaire brut, mais aussi directement en maintenant le salaire, à certaines conditions, durant plusieurs mois, sans perte pour le salarié. Il est, bien entendu, possible de s’assurer pour cela, à un coût élevé.

Mais surtout, la mesure tend à rendre les employeurs responsables des arrêts maladie de leurs salariés. Ce qui est totalement aberrant. En dehors des cas particuliers de maladie professionnelle ou de véritable harcèlement moral – sévèrement sanctionné par les tribunaux -, l’employeur n’est nullement la cause des problèmes de santé de ses salariés ! Il ne peut être tenu pour garant de leur parfaite forme physique ou mentale : à moins de considérer que le travail est en soi un facteur de risque…

Qui n’a jamais entendu une phrase du style « Je me mets en arrêt » ? Ce genre de propos est quotidien dans les entreprises, lorsque la fatigue, la lassitude, des problèmes personnels ou professionnels, sans compter la volonté de nuire à l’employeur ou la simple paresse, incitent le salarié à suspendre pour quelques jours son travail. Les médecins, parfaitement conscients du problème, sont débordés par ces demandes dont la justification est souvent invérifiable : déprime, maux de dos, grande fatigue… Ils savent parfaitement qu’en cas de refus, un autre, complaisant celui-ci, accordera au patient ce qu’il demande. Est-ce aux entreprises de payer cela, alors qu’elles subissent déjà la désorganisation inhérente à ces arrêts de pure complaisance ?

Les TPE craignent, par-dessus tout, ce genre de situation. Une secrétaire absente oblige ses collègues à assumer sa charge de travail, au prix d’heures supplémentaires et d’un retard immédiat dans une production qui se fait souvent à flux tendu. Un ouvrier malade dans un atelier de quatre personnes, un chauffeur absent qui bouleverse les tournées quotidiennes, un comptable qui reste chez lui le jour de la déclaration mensuelle de TVA provoquent des problèmes que nos fonctionnaires pléthoriques peinent à imaginer. Il s’agit pourtant de la vie quotidienne des entreprises.

Nul doute que cette mesure, si elle devait être mise en œuvre, susciterait de fortes réactions du patronat français, celui qui assume jour après jour l’essentiel de l’activité économique nationale. Un patronat qui s’étonne du coût caché du travail, et qui ploie sous des charges que le bulletin de salaire ne détaille pas : médecine du travail aux tarifs exorbitants, cabinets comptables chargés de la paie et bientôt de l’impôt à la source, taxe d’apprentissage, taxe sur les salaires, sans compter les heures passées à gérer les questions d’horaires, de personnes, de vacances, de remplacements, etc.

Rien d’étonnant, dès lors, que de plus en plus de patrons se tournent vers des collaborateurs libéraux, dont la rémunération facturée au temps passé simplifie l’administration quotidienne. Des collaborateurs dans le collimateur de l’URSSAF, qui fait requalifier leur activité en contrats de travail, sanctions à la clé. Mais le gouvernement aime les entreprises, promis !

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07 août 2018 à 10:43

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