Église catholique : une nouvelle décision du pape qui pose question

Pope Francis gestures at the end of the weekly audience in Saint Peter's Square at the Vatican

Le Saint-Père a promulgué, le 3 septembre dernier, un motu proprio passé sous silence : "Magnum principium" ("Principe important"). Silence qui est parfois une bonne chose dans la vie de l’Église…

Cependant, cette publication (en vigueur le 1er octobre) modifiera la vie des Églises locales puisqu'elle concerne les textes liturgiques et bibliques en vigueur dans chaque pays et le processus de validation requis auprès de Rome.

Notons qu’il s’agit d’un motu proprio, c'est-à-dire un acte de la propre autorité du pape. Le Saint-Père édicte ici des règles. Or, le dernier texte sur ce sujet fut publié en 2001 par la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. Doit-on voir en cela, de la part du pape, une habitude de travailler à côté des grands dicastères romains et la volonté de les court-circuiter ?

Donc, dorénavant, les traductions seront faites sous l’autorité des évêques, comme jusqu’alors, avec la différence que Rome ne pourra décider de son propre chef de les modifier. Son rôle consistera à dire sa simple "confirmatio" (sa reconnaissance) devant l’emploi desdites traductions.

À l’inverse, les adaptations apportées localement aux livres liturgiques devront obtenir la "recognitio" du Vatican, qui pourra décider de les approuver ou les modifier. Concrètement, l'autorité des évêques en matière liturgique est renforcée.

Un détail ? Oui mais…

Certains, tel l’abbé Christian Paponaud, s’interrogent sur la portée de cette autorisation aux adaptations sur divers moments de la messe ; voire sur la façon de donner le baiser de paix. Son interrogation semble dépasser la portée du document du pape François, laquelle serait uniquement sur les livres liturgiques.

Ceci est tout à fait suffisant pour perpétuer les inquiétudes et contestations existantes. On songe aux formules du Notre-Père, du credo et du kyriale qui s’éloignent parfois sensiblement du texte latin. Doivent-elles être perçues comme simples traductions ou des adaptations substantielles ?

Quant à ces dernières… Le motu proprio semble ouvrir la porte à des ajouts. Que comprendre ? Verra-t-on des extraits de tel livre de tradition "très locale" insérés par l’usage de langues vernaculaires ? Verra-t-on les paroles prononcées par le prêtre sur le missel modifiées ? Une inquiétude se fait jour !

Reste que Rome réaffirme sa pleine autorité par son exigence de "recognitio" dans ce cas. Tout ceci repose sur la subtile nuance à faire entre « adaptations radicales » et « traductions ».

D’autres points sont à relever.

"...la fidélité… doit être recherchée dans le contexte de l'acte communicatif dans son ensemble et… son genre littéraire…" Le contexte de l’acte communicatif… Le genre littéraire… Voilà qui semble furieusement moderne ! Il reste à prier pour que les abus connus dans le passé dans l’évangélisation de la jeunesse ne se renouvellent pas – éduquer les enfants se fait mieux en les élevant par le vrai que par un langage dit (mais à tort) "adapté à leur âge".

"...les langues vernaculaires… pourraient devenir des langues liturgiques, se distinguant… par la profondeur de leurs concepts..." Sans faire du Jules Ferry, peut-on légitimement affirmer que notre civilisation est de culture judéo-helléno-latine et que les concepts y ont été formés par les auteurs des livres de la Bible, les Pères de l’Eglise et les Docteurs ? Aussi les apports de profonds concepts nouveaux mais "très locaux" nous laissent un peu perplexe…

Bref, ces nouvelles règles ouvrent des portes ; suivons attentivement l’application qui en sera faite !

Bertrand du Boullay
Bertrand du Boullay
Ingénieur à la retraite

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