"J’avais confiance, il avait la Légion d’honneur !"

Refrain autrefois connu, chanté par les braves gens que les escrocs et autres marchands de brosses à reluire venaient détrousser à domicile.

Il y a longtemps que la Légion d’honneur, vraie ou fausse, n’inspire plus confiance à personne. Question du Figaro à ses lecteurs, ce jeudi matin : « Pensez-vous qu’on accorde trop facilement la Légion d’honneur en France ? » Réponse : oui 97,7 %, non 2,3 %. Ça a le mérite d’être clair.

Distribuée comme des bonbons un soir d’Halloween, elle est devenue bien plus la marque des amateurs de hochets que des méritants de la nation.

Notez bien, c’était, nous disent les historiens, l’esprit de son créateur : "Rallier en flattant les vanités." Mission accomplie ! Son père Bonaparte, écrit Le Figaro qui en retrace l’histoire, aurait même répondu à un membre du Conseil d’État qui râlait devant cette décoration "violant le principe révolutionnaire d’égalité" : "On appelle cela des hochets ; eh bien, c'est avec des hochets qu'on mène les hommes !"

Depuis son institution par la loi du 29 floréal an X (19 mai 1802), les chiffres, il faut dire, sont parlants… et les hochets légion. Les derniers occupants de l’Élysée ont distribué à tout va. C’est le Président Giscard d’Estaing qui remporte la palme : en moyenne annuelle, 4.600 nouveaux légionnaires. Suivi de Pompidou, 4.200 ; puis de Sarkozy, 3.461 ; de Mitterrand, 3.452 ; puis enfin Hollande, 3.444 ; et Chirac, 3.440. N’en jetez plus, la cour est pleine…

Si pleine que le nouveau Président envisage de faire baisser drastiquement la moyenne. Effet Weinstein ? Peut-être… On songe, dit-on, à tenter de retirer sa Légion d’honneur au gros porc. Il est vrai que l’honneur est, là-dedans, un mot de trop, et de gros porcs en escrocs de toute nature, les listes des récipiendaires demanderaient sans aucun doute à être expurgées.

Rompant avec l’emballement d’un François Hollande qui consacrait de plus en plus de temps à ces petites sauteries, honorant à tout va le monde du spectacle, Emmanuel Macron l’a dit, il veut « revaloriser » cette distinction nationale. Lui rendre de la hauteur et du poids. Réduction drastique des candidats et examen minutieux de la liste par le conseil de l’ordre de la Légion d’honneur avant l’examen final par le Président soi-même. "Le président de la République insiste sur la valeur des bénéficiaires, il attend des dossiers fondés exclusivement sur le mérite, avec une action inscrite dans la durée, au service de l'intérêt général", dit l’entourage. Déjà, sur les 600 inscrits à la promotion du 14 Juillet, il n’en a "reçu" que 101, dont 51 femmes.

« Celles et ceux »… « Chacune et chacun »… « Françaises, Français »… « Citoyennes, citoyens »… Gageons quand même que le Président sera respectueux de la stricte parité obligatoire instaurée par Nicolas Sarkozy. Une ineptie de plus.

Au menu de la réforme, donc, "un décret triennal fixant le nombre de nominations et de promotions". Et plus question, pour les anciens ministres, académiciens et ex-ambassadeurs, etc., de ramasser les rubans à l’usure. Pas davantage pour les militaires : "Il ne suffira pas d'être un ancien appelé d'Algérie ou d'un autre théâtre d'opérations, il faudra avoir fait preuve d'un engagement dans sa mission au combat". Et pour insuffler autrement que par le show-biz un peu de modernité dans cette vieille institution, Emmanuel Macron entend distinguer "des personnes méritantes issues de secteurs d'activités émergents, comme le numérique, pour diversifier les profils". Et, mieux encore, il souhaite remettre à l’honneur "l'initiative citoyenne", à savoir la possibilité offerte à chaque Français de proposer en préfecture la candidature d’une personnalité méritante, à condition de constituer un dossier biographique et en réunissant cinquante signatures de citoyens majeurs.

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02 novembre 2017 à 15:49

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