Diffusion de la vidéo de l’arrestation de Théo : « Personne n’a présenté d’excuses aux policiers incriminés »

Alexandre Langlois, secrétaire général du syndicat de police VIGI, revient sur l'affaire Théo au micro de Boulevard Voltaire. Les circonstances de l'arrestation de ce jeune, il y a un an, avaient défrayé la chronique au point de précipiter le chef de l'État au chevet de la victime. Un an après, Europe 1 diffuse une vidéo qui permet de relativiser la soi-disant violence des forces de l'ordre lors de l'arrestation.

Alexandre Langlois, quel est votre sentiment aujourd’hui ?

Nous sommes déçus évidemment. Dès qu'il y a un fait divers, tout le monde s'engouffre dans le buzz médiatique pour lyncher la Police plutôt que d’attendre sereinement les conclusions de l’enquête.
A part une personne qui nous avait calomniés à l’époque, personne n’a présenté ses excuses. Ma déception est donc d'autant plus grande en raison de tout l'investissent de mes collègues durant ces dernières années.
Cela aurait été l’occasion de relier les choses, mais malheureusement cela n’a pas été fait.

Pourquoi la vidéo qui éclaire les faits n'est sortie qu’un an après l’affaire ?

Nous ne savons pas et nous aimerions bien le savoir. Cela aurait pu éclaircir beaucoup de choses. A priori, elle provient d'une caméra de la ville. Il n'est donc pas très difficile de se la procurer.
Le maire de la ville d'Aulnay-sous-Bois avait connaissance de cette vidéo.
Le président de la République qui s'était déplacé à l'époque avait connaissance ou aurait pu avoir connaissance de cette vidéo s’il s’était renseigné.
Malgré l’accès au dossier, tous ces gens n’ont rien fait. On ne sait pas pourquoi et c'est très choquant.
C’était en pleine campagne électorale. Tout le monde voulait faire le buzz. Plutôt que de parler du fond du sujet, tout le monde a préféré rester sur les apparences. Nous n’avons donc pas obtenu d’explications rationnelles qui expliqueraient pourquoi cette vidéo n'a pas été diffusée.
On nous oppose parfois le secret de l’enquête. Il est amusant de constater que l’enquête est à géométrie variable. Les vidéos filmant sous un certain angle ont le droit d'être largement diffusées. En revanche, les vidéos qui auraient pu calmer les esprits ou expliquer une situation n’ont pas le droit d’être diffusées. On ne se l'explique pas !

Est-ce que ce genre de dérapages augmentent progressivement, car il y a de plus en plus d’affaires comme celle-ci ou au contraire est-ce la situation sur le terrain qui est de pire en pire ?

Aujourd’hui les faits sont beaucoup plus médiatisés, parce qu'on peut filmer avec son smartphone par exemple.
De manière générale, la violence légitime utilisée par la Police a baissé. Mais la société, elle, se rend compte de ce qui se passe grâce à la vidéo.
Les vidéos ne font que renforcer un sentiment qui prévaut dans une partie de la population et qui consiste à croire que la Police est méchante et qu’elle fait toujours n’importe quoi...
De plus, les commentaires mis en avant sont souvent ceux qui sont tournés de façon à faire le buzz. Ils ne travestissent pas la vérité, mais l’orientent grandement. Pourtant, lorsqu’on regarde l'arrière-plan, la Police ne fait la plupart du temps que son travail.
Je pense à un article paru dans le Parisien récemment qui titrait : « un jeune s’est fait tirer dessus par la Police ». En réalité, quand on lit l'article, on se rend compte que ce ''jeune'' en question était un délinquant pris en flagrant délit de vol de voiture et qui, pour s’échapper, était en train d'écraser mes collègues. Quand on a l’explication, on se rend compte que c'est juste un policier qui s'est défendu contre un délinquant.
Malheureusement en France, à l'heure actuelle, quand on s’en prend aux policiers, on n'est pas vraiment inquiété. Ca peut donner envie à certaines personnes de se confronter à la Police. Elles ne risquent rien de toute façon.
Certaines personnes n’hésitent pas à se filmer en train de taper des policiers, car ils savent que cela fera le buzz. Ils estiment que c’est rigolo et ils montrent par la même occasion qu’ils font partie d’un clan. Je pense notamment à Champigny.
Cela participe à un climat de violence. On aurait dû tout diffuser tout de suite pour chercher à apaiser la situation et à recréer un climat de confiance avec la Police. Mais on n’en est pas encore là !

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 01/02/2018 à 2:55.
Alexandre Langlois
Alexandre Langlois
Secrétaire Général du syndicat de police VIGI

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