Départ de Nicolas Hulot, ou l’été médusé d’Emmanuel Macron

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Quel titre donner à cet été 2018 qui s’achève donc précocement, ce mardi matin, avec la démission de Nicolas Hulot ? On hésite entre Un été meurtrier ou L’Été des méduses. Je pense à ce titre en imaginant la tête de Marlène Schiappa apprenant « la nouvelle » : un tableau du Caravage et non de Botticelli pour les connaisseurs et les esthètes ! Ceux qui faisaient encore semblant de croire qu’avec Emmanuel Macron, la politique ne serait jamais plus comme avant sont servis. Et par un non-professionnel de la politique, en plus !

Eh oui, la politique, ce n’est pas que des décisions préparées dans le secret des ministères par une armée de technocrates pondant des fiches à tour de bras et imposant leurs idées aux politiques. Certes, ce gouvernement est probablement l’un des plus technocratiques que la France ait connus depuis des décennies. Peut-être faut-il remonter à celui de l’amiral Darlan, de février 1941 à avril 1942, toutes choses égales par ailleurs, pour trouver autant de technocratie aux commandes. Mais la politique, c’est aussi, et surtout, des rapports humains et… des rapports de force. "Où sont mes troupes ?" a, du reste, déclaré Nicolas Hulot, avec une émotion qui ne semblait pas feinte, au micro de France Inter. Une interpellation qui n’est pas sans rappeler celle de Staline : "Le pape, combien de divisions ?" Nicolas Hulot est une sorte de pape de l’écologie. Et il a compris que sa seule présence charismatique et médiatique ne suffirait pas à convertir le monde – ou, tout du moins, le petit monde enchanté de la Macronie - à sa religion. En cela, c’est retour, non pas vers le futur, mais vers le réel.

Ce départ prévisible et, en même temps, imprévu, non planifié, de Nicolas Hulot rappelle à Emmanuel Macron que tout ne se passe pas forcément comme on avait prévu. Que la météo (réchauffement climatique ou pas) est facétieuse. Un départ qui achève de lui bousiller son été. Ça avait pourtant si bien démarré avec la fête de la Musique dans la cour de l’Élysée, puis la Coupe du monde. In fine, un été pourri, malgré le soleil et les bains dans la piscine et la foule de Brégançon.

Gros orage, d’abord, avec l’affaire Benalla, dont les nuages menaçants ne se sont pas complètement éloignés car les auditions au Sénat vont reprendre avec l’arrivée de l’automne. Une vendange tardive prometteuse pour l’opposition qui aurait tort de se gêner. Philippe Bas va, sans doute, revenir de ses vacances parlementaires avec tout plein de questions à poser à tout plein de gens… Orage moins violent, en apparence, mais qui pourrait causer des dégâts : l’affaire Kohler, cette histoire d’une croisière où l’on s’amuse si bien entre gens du même monde. Et l’affaire Nyssen qui nous révèle que nous avons, depuis un an, à la tête d’un ministère, qui tout de même fut tenu - certes, aux temps des croisades - par André Malraux et Maurice Druon, au mieux une bricoleuse approximative de l’immobilier, au pire une fraudeuse. La Justice nous le dira probablement. Orage, aussi, avec l’annonce des mesures budgétaires pour 2019. Et puis, plus que l’orage qui, par définition, n’est que passager, il y a ce climat permanent de lourdeur que font peser l’insécurité qui ne recule pas et le terrorisme islamiste (pardon, psychiatrique) qui s’installe dans la banalité quotidienne.

Oui, le gouvernement peut être médusé par le départ de Nicolas Hulot. Et les Français aussi, pour plein d'autres raisons. L'Été des méduses ? Plutôt celui des médusés et autres désabusés.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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