Dans la crise : faire face au peuple ou orienter l’avenir de la nation ?

475px-Constitution_sceau

Dans les turbulences de la vie d’un pays, plutôt que les échappatoires ou le durcissement, il importe de retrouver l’esprit du contrat social et une stratégique vision nationale.

Les Français ont la chance de vivre, depuis 1958, sous l’égide de la Constitution de la Ve République qui repose sur deux piliers : le respect du peuple souverain et le support de la confiance civique. D’une part les citoyens composant le peuple ont non seulement le premier mot en élisant le chef de l’État au suffrage universel direct, mais aussi le dernier mot dans sa participation aux procédures permettant le retour de la confiance.

En effet, l’esprit original de la Constitution garantit la stabilité du président de la République, non pas comme un bouclier de sécurité, mais à condition pour lui de respecter la règle d’or de la participation du peuple à son avenir. Cette confiance est d’abord inscrite dans le mandat électoral initial et, ensuite, elle appelle un contrôle permanent. En effet, le maintien de la confiance, de l’ordre de 40 à 60 %, conditionne strictement la possibilité de diriger le pays et la capacité de procéder aux réformes indispensables.

Le constituant, qui a prévu que le Président pouvait perdre la confiance en cours de route, a offert les moyens de la reconquérir. Le processus du réarmement démocratique passe par le référendum ou par la dissolution de l’Assemblée nationale. En cas de dialogue de sourds, l’intervention du peuple peut conduire aux extrêmes de la démission ou de l’occupation de la rue. Le général de Gaulle, que l’on taxait de dictateur en prétextant une Constitution à sa mesure, a expérimenté, même à ses dépens, les différentes répliques à la crise de confiance, jusqu’à la démission.

Pour sortir de l’impasse et pour retrouver ce minimum de confiance, au-delà de la communication par le dialogue ou la compassion, il importe de dépasser les inefficaces manœuvres d’un superficiel apaisement et de choisir de proposer au peuple, dans la dynamique d’une mobilisation nationale, un grand plan de développement, correspondant aux priorités concrètes du moment afin de répondre aux aspirations démocratiques à moyen et long terme. Cette proposition n’est nullement journalistique ou académique. Par exemple, lorsque, dans les années 60, la Bretagne a été le théâtre de très graves troubles à l’ordre public, manifestés par la bataille du rail ou du lait, le gouvernement de Charles de Gaulle a proposé à tous les responsables de la région de se réunir pour faire connaître leurs priorités. Sur la base d’une attitude confiante et dépourvue de démagogie, la réponse gouvernementale d’un très grand plan breton a permis à la Bretagne de se hisser au niveau des toutes premières régions européennes. Il en a été de même, avec le Président Pompidou, grâce à la vigoureuse politique d’aménagement du territoire qui a reconnu le potentiel de développement de chaque partie du territoire autour des maires.

Voilà comment, en changeant l’état d’esprit et les perspectives, il est possible de s’élever au-dessus des procès formels intentés au populisme et au nationalisme. Quand le danger menace la paix civile, il est urgent de puiser dans la réserve de force du pays, c’est-à-dire dans les composantes de l’État républicain sur le territoire : le peuple représente la vitalité civique des citoyens, la nation illustre la communauté solidaire d’une histoire bimillénaire, la patrie constitue le cœur de la France.

Paul Bernard
Paul Bernard
Docteur en droit, préfet de région honoraire, ancien préfet de la région Corse, président d'honneur de l’Association du Corps préfectoral

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois