En matière de mesure des évolutions, notamment économiques, il serait illusoire, voire absurde, de s'en tenir à une appréciation isolée des chiffres. Observer l'évolution positive d'un indice sans tenir compte du contexte et des évolutions parallèles d'autres indicateurs ou de celles de ses concurrents ou partenaires serait faire preuve, au mieux d'un manque de discernement, au pire d'une opération de manipulation.

L'INSEE vient de publier l'indice de la croissance française. Celle-ci est de 1.9 % sur douze mois. Considérée dans l'absolu, cette "progression" paraît remarquable ou, du moins, est inédite depuis au moins cinq ans.

Pour autant, doit-on crier victoire comme ne manquera sûrement pas de le faire (d'une façon ou d'une autre, par l'un ou l'autre de ses ministres) le gouvernement ?

Pour juger en toute bonne foi et avec quelques chances de ne pas se leurrer, il convient de comparer cette performance avec celle des autres pays. Tout d'abord, observons que la croissance mondiale tirée vers le haut par la Chine (+6.4 %) ou l'Inde (+7.4 %) pourrait afficher une progression de 3.7 %. L'Union européenne, dans un créneau plus comparable, devrait prétendre à un chiffre de 2,5 % et l'Allemagne 2,2 %.

Ces chiffres devraient nous inciter à une modération. En réalité, il faut bien voir que, dans l'histoire, nous sommes encore distancés par notre principal concurrent et néanmoins partenaire, et talonnés par la Grèce (le gouvernement envisage 2,4 % de croissance pour cette année).

Dans le même temps, nous faisons moins bien que le Danemark, la Suède, l’Autriche, l'Espagne ou les Pays-Bas, pour ne citer que les pays principaux, car on pourrait y ajouter la Pologne ou l'Irlande. En réalité, dans le contexte concurrentiel, nous reculons, et c'est bien là ce qui est inquiétant. Car en dépit des promesses affichées par le pouvoir actuel, qui se vante d'être tiré en avant par la force de sa jeunesse et de son esprit innovant, nous faisons en réalité moins bien - nous reculons.

Par ailleurs, les autres indices (celui du niveau de l'emploi, la désindustrialisation continue du pays, le déficit public, le marasme du système de santé...) ne montrent, eux, aucun signe d'amélioration durable.

Alors, que faire pour entretenir le courant porteur de la campagne du printemps 2017 qui, par parenthèse, se construisit, ne l'oublions pas, sur un rejet aveugle plus que sur une adhésion massive ?

Comment faire pour contenir les déceptions et canaliser les revendications de ce peuple qu'il faut pourtant bien tenir à l'écart des grandes décisions et des profits plus ou moins grands ?

Anesthésier l'opinion publique et lui donner l'illusion que son pouvoir d'achat augmente alors que l'écart entre très riches et très pauvres ne cesse d'augmenter sans que, pour autant, la classe moyenne soit épargnée par l'impôt ?

Comme par le passé, comme lors des derniers quinquennats depuis 2002, Emmanuel Macron choisit la voie du leurre. Il laisse enfler des dossiers épineux, il s'agite comme un cabri en parlant d'Europe et il se gonfle comme un paon en donnant des leçons aux États-Unis, au Venezuela, à Poutine, et en devenant chanoine du pape. Cette "politique" revient à se concilier tous les extrêmes et, par là même, à masquer toutes les vraies lacunes.

En réalité, derrière le grand rideau de fumée établi par « la com' », qui demeure la principale force de ce Président, tout continue comme avant... Mais en pire !

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31 janvier 2018 à 17:54

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