Les représentants de la région de Corse ont pris l’initiative de rompre les discussions en cours. S’il apparaît que le gouvernement de la République serait ainsi mis en demeure de "lever le flou sur ses intentions", la même exigence peut se retourner vis-à-vis des dirigeants de la région de Corse. Que veulent-ils qu’ils n’aient déjà obtenu, sur les plans politique, financier, administratif, économique tout au long des deux ou trois réformes successives ?

Avant de passer à l’étape suivante (encore faudrait-il préciser laquelle), il serait convenable que les responsables régionaux démontrent qu’ils ont été capables de mettre en œuvre un réel développement économique et social, de façon autonome et efficace, au-delà des différents crédits publics de l’État.

En effet, les compétences déjà accordées devraient permettre de proposer un plan stratégique de promotion des nombreux atouts de la nouvelle région, en étroite et loyale collaboration avec l’autorité de l’État. Au cours de la Ve République, dans les années 70, les élus de Bretagne ont su obtenir un ambitieux plan breton qui a déclenché le développement régional, de même que dans les années 60 l’aménagement du littoral Languedoc-Roussillon a connu une brillante réussite grâce à la solidarité des élus régionaux avec l’État.

Les revendications politiques traditionnelles, notamment la co-officialité de la langue corse, le statut de résident, etc., sont maladroites et ne peuvent aboutir à des réponses utiles, car ces questions comportent la mise en cause de l’État de droit républicain. Au demeurant, ces prétentions peuvent-elles réellement contribuer au bonheur des habitants ?

En définitive, on retrouve la manœuvre habituelle de la provocation lancée à l’État, au gouvernement et, maintenant, au chef de l’État lui-même. Les dirigeants politiques ne cherchent qu’à mettre la République au défi, alors que le peuple français aurait aussi son mot à dire.

Le gouvernement doit s’en tenir à la fermeté et à la clarté, en évitant de tomber dans le piège consistant à répondre à l’impossible, car les revendications ne cesseront pas de se multiplier à seule fin de faire plier l’État.

La meilleure façon de procéder, pour les représentants de Corse, serait de présenter le bilan des actions effectivement conduites à l’initiative des élus sur la base des compétences politiques, administratives et financières déjà dévolues, ainsi que le projet d’une politique de développement économique et social proposée au nom de la nouvelle organisation régionale.

Sur une telle base responsable, un dialogue pourra s’engager, pour lever les obstacles objectifs, en bénéficiant d’une forte cohésion nationale. La voie de la négociation relève d’un autre état d’esprit qui révèle une pression tactique et une hésitation persistante à s’intégrer dans la communauté nationale, en cherchant à gagner toujours plus, sans avouer le but poursuivi en définitive.

En fait, le problème ne se pose pas entre les élus d’une région et le gouvernement, mais entre les citoyens habitants de l’île et l’ensemble du peuple français qui, confronté à un monde implacable, est actuellement appelé à surmonter les lourdes épreuves économiques et financières et à engager des réformes considérables exigeant la mobilisation des efforts de tous les citoyens. À cet égard, la problématique corse n’est pas d’une nature différente de celle de la nation.

Par ailleurs, les élus de la région de Corse gagneraient en sérénité et en respectabilité s’ils pouvaient ou voulaient exprimer publiquement la douloureuse émotion de tous les citoyens de la région de Corse, condamnant le crime monstrueux de l’assassinat d’un préfet de la République.

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26 janvier 2018 à 23:48

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