En bon Valéry Giscard d’Estaing qu’il est, l’âge en moins et les cheveux en plus, Emmanuel Macron développe tranquillement sa vision du pays – deux Français sur trois, libéralisme avancé et posture néo-gaullienne – tandis qu’au même moment…

Au même moment, François Hollande n’est pas content. Il est à Séoul (Corée du Sud), donne une conférence sûrement moins bien payée que celles de son prédécesseur Nicolas Sarkozy et dit du mal de Donald Trump ; ce qui ne mange pas de pain et encore moins de riz. Mais il n’est pas content. Pas content contre qui ? Emmanuel Macron, dont la politique fiscale, globalement la même que la sienne, n’a pas l’heur de lui plaire.

D’où cette déclaration promise à la postérité, si d’aventure quelqu’un parvient un jour à la traduire en langue vernaculaire : "La mondialisation a incontestablement augmenté les inégalités à mesure que la croissance elle-même progressait. Nous avons donc une croissance qui est inégalitaire avec une concentration de la richesse sur un nombre limité de personnes. Il faut donc avoir une politique de redistribution par la fiscalité." Pierre Desproges n’aurait pas mieux dit.

Plus sérieusement, et ce, quasiment au même moment, Xi Jinping rempile pour un nouveau mandat de cinq ans à la tête d’un empire du Milieu devenu puissance politique, économique et militaire prépondérante dans les affaires du monde. Voilà qui est peut-être un brin plus intéressant, sachant que ce sacre commence à signer le glas de tant d’illusions occidentales.

Ainsi, nos élites ayant si longtemps biberonné au messianisme d’obédience anglo-saxonne estimaient qu’économie de marché et démocratie libérale étaient horizons indépassables de la pensée et de la bonne gouvernance. Tant que les récalcitrants faisaient dos rond sous les bombes de l’OTAN et de ses alliés, la rhétorique était sans risque. Aujourd’hui, un peu moins. Les mêmes s’autopersuadaient encore que tous les Terriens rêvaient d’être ce que nous sommes devenus : le ventre mou de la planète. Soit une société avachie dans un hédonisme devenu roi, perdue en des luttes internes où transgenres et partisans de l’écriture inclusive, tenants de l’art qui dérange et de l’ouverture à l’autre tiennent désormais le haut du pavé. Bref, un magma informe dont la force tint des siècles durant grâce à celle de la canonnière ; achetez nos produits, ouvrez vos frontières et adoptez nos mœurs, autrement il vous en cuira.

Des guerres de l’opium à celles du pétrole, des conflits suscités aux coups d’État téléguidés, cette politique occidentale paraissait invincible parce que victorieuse sur le temps court. Mais le temps long prend toujours sa revanche. La preuve par la Chine, désormais assez forte pour ne plus courber l’échine. Communisme ou pas, maoïsme ou non, Confucius et Sun Tzu sont toujours là. L’art de la sagesse et celui de la guerre. Ou comment la première conduit à mener la seconde au moment opportun. En Russie, autre vieille nation dont un Vladimir Poutine relève aujourd’hui la grandeur et le drapeau, on appelle ça jouer aux échecs. À Pékin, c’est le go. Et nous, le 421 ?

Car en France, un Macron tacle un Hollande qui le houspille ensuite. Un avenir qui se mesure aux décimales d’un ou deux points de croissance. Un destin indexé à l’aune de la lutte contre le harcèlement sexuel et la promotion de la diversité. Un modèle qui ne fait plus rêver personne. L’Occident repart à son néant originel. Quant à la France, elle ne fait plus l’histoire, se contentant de la regarder passer. Comme une vache le ferait d’un train.

La Chine s’éveille. François et Emmanuel s’endorment. Le réveil promet d’être rude.

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19 octobre 2017 à 20:16

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