Une unanimité s'est manifestée aussitôt après cette parodie de débat. Brouillon indigne d'une confrontation pour deux prétendants à la magistrature suprême du pays !

Mais si tous les commentateurs ont relevé, avec quelques nuances affectives, les attitudes inciviles, agressives, outrancières, désordonnées ou hors du propos des candidats, personne en revanche n'a commenté la conduite de ce face-à-face, sans doute par solidarité avec la corporation journalistique ?

Or, la raison principale de ce fiasco tient, me semble-t-il, d'abord et surtout à l'organisation et la direction de cet événement. Les « animateurs », Nathalie Saint-Cricq et Christophe Jakubyszyn, ressemblaient à des hologrammes, timorés, inconsistants, repliés en arbitres de touche, dépourvus de maîtrise permettant de jalonner et baliser avec dignité les échanges et, en premier lieu, leurs sujets. Sauf si le principe en avait été préalablement retenu, aux fins de chauffer l'atmosphère et, donc, l'audience, laisser les intervenants s'affronter en lançant les cailloux de la démesure et de l'agressivité ne contribua guère à éclairer et satisfaire les téléspectateurs.

En deux heures et demie, les sujets importants liés à la mission régalienne du chef de l’État ne furent que peu abordés ou carrément passés sous silence. Ainsi, la Défense, cette constante de l'oubli dans tous les débats depuis le temps des primaires, est demeurée la guerre de l'ombre. Sujet trop sérieux pour en débattre en place publique ? Même si Macron évoquait à deux reprises le rôle de chef des armées, pour exorciser sans doute une critique formulée sur d'autres médias ou réseaux, aucune relance opportune pour focaliser sur cette importante question, pas une minute consacrée à la grande muette, qui mérite plus que jamais son sobriquet désobligeant !

Certes, la diplomatie et les relations internationales furent discutées, et c'est bien le moindre à ce niveau de futures responsabilités, avec les divergences marquées qui n'étaient pas des révélations pour les spectateurs.

Mais quid de la dissuasion et du pouvoir incommensurable du Président, de l'énergie et de la filière nucléaires, de son corollaire l'écologie, de la ruralité, de l'agriculture et j'en passe ? Frustration, déception, voire exaspération, la fatigue en prime !

Être présentateur ou commentateur de la politique ne prédispose pas à diriger une rencontre de ce niveau.

Que les chaînes de télévision organisent et diffusent le débat, c'est leur rôle. D'ailleurs, sur le plan technique, certains détails étaient à observer. Ainsi, deux caméras pouvaient montrer chaque candidat en gros plan sous deux angles différents. Le débatteur Macron bénéficia à maintes reprises de cet avantage qui lui permettait de faire face au public (dynamique d'autorité) tout en répondant ou s'adressant à l'un des meneurs de jeu. Précaution et subtilité dont Marine Le Pen fut privée (sauf en toute fin d'émission), marquant ainsi son indécision et son imprécision avec les circonvolutions du regard.

Mais que les « employés maison » soient commis à l'animation, c'est autre chose. Cela exige un professionnalisme différent et exigeant. En l’occurrence, celle de ce mercredi soir fut pitoyable ! Jacques Séguéla a dû s'arracher les derniers cheveux d'une prestation aussi désastreuse…

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04 mai 2017 à 22:21

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