Affaire Polanski : aux États-Unis, la loi est la même pour tout le monde

Une photo de Samantha Geimer prise en 1977 par Roman Polanski.
Une photo de Samantha Geimer prise en 1977 par Roman Polanski.

Certains fruits poussent hors-sol, c’est-à-dire qu’ils ne connaîtront jamais les réalités de la terre. Eh bien, ce qui est vrai pour les fruits l’est aussi pour certaines personnalités, élevées dans l’idée qu’on peut jouir de la vie sans entraves. En France, et pourvu qu’elles fassent vœu de progressisme, ces personnalités sont très choyées, quels que furent leurs actes passés.

Ainsi, sûr de son bon droit et bien loin de Descartes – lequel doutait beaucoup ! –, Roman Polanski, dont le talent de cinéaste est indéniable mais pas la présence d’esprit, vient de voir sa demande d’immunité rejetée par un juge américain. Pour mémoire : "Roman Polanski est accusé d’avoir drogué, puis violé, une adolescente de 13 ans dans la maison de Jack Nicholson, en 1977. Il a admis une relation sexuelle après que les autres chefs d’accusation plus graves ont été abandonnés, et a passé quarante-deux jours en détention avant d’être relâché sous caution. Il a ensuite fui en France en 1978 et n’est jamais revenu aux États-Unis" (source : lemonde.fr).

Ah, si le violeur de Samantha Geimer avait été un Louis-Ferdinand Céline, c’eût été plus simple pour ces artistes français, qui se morfondaient encore il y a peu, suite au tollé provoqué par le choix de Polanski comme président de la 42e cérémonie des César ! Tollé qui a obligé l’intéressé à décliner l’offre, Emmanuelle Seigner – l’épouse du réalisateur – dénonçant alors "la méchanceté et la bêtise humaine". Il fallait oser !

Certes, la victime a, depuis, pardonné à son agresseur et demandé l’abandon des poursuites, cherchant surtout à oublier ce qu’elle considère comme pire que le viol en lui-même : le harcèlement médiatique. En 2013, Samantha Geimer confiait au Nouvel Observateur : "J’étais présentée comme la petite salope qui voulait profiter du réalisateur célèbre, et ma mère comme la maquerelle n’hésitant pas à monnayer sa fille pour faire carrière." Elle ajoutait, avec une ironie aussi grinçante que douloureuse : "Si je devais choisir entre le viol et revivre ce qui s’est passé après, je choisirais le viol."

Polanski peut, toutefois, continuer à briller dans les festivals et ailleurs. Il n’est pas un prêtre pédophile – que je ne défends pas plus ! – qu’on peut jeter à la vindicte populaire : c’est un membre du cénacle, comme l’a magistralement démontré le scandale provoqué par son arrestation en Suisse, en vue d’une extradition aux États-Unis, en 2009. La pression internationale – notamment française – fut telle que les Helvètes capitulèrent. Polanski pouvait rentrer triomphalement en France.

Mais la France des privilégiés n’assumant pas leurs actes n’est pas la norme partout et le juge Scott Gordon, ayant rejeté la requête de Polanski de venir s’expliquer librement outre-Atlantique, a au moins respecté ce principe d’égalité de traitement qui fait cruellement défaut chez nous. Aux États-Unis, la virtuosité n’excuse pas tout, même si l’on appartient au camp du Bien.

Eh oui, on peut être un saint ici et un démon là-bas !

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