Aux États-Unis, au XIXe siècle, "la loi de Lynch était fréquemment appliquée ; un homme convaincu de meurtre ou de vol pouvait se voir arrêter, juger, et... pendre en moins d'un quart d'heure, pour peu qu'un comité de vigilance énergique s'emparât de lui" (Paul de Rousiers, La Vie américaine, 1899).

Aujourd’hui, les comités de vigilance éclosent un peu partout sur Internet et les réseaux sociaux s’abritent bien courageusement derrière leurs écrans tout en balançant à la vindicte publique qui leur « porc », qui leur curé accusé d’attouchement, qui leur patron harceleur sinon leur voisin.

Avant, c’est-à-dire en un temps que ceux de la classe 60 du XXe siècle ont à peine connu, on lynchait par procuration en dénonçant l’appartenance judaïque ou communiste d’untel à la Gestapo ; puis vint le temps où on lynchait par tonte capillaire et lapidation justicière ceux suspectés de collaborationnisme. Très souvent, la mort attendait les suppliciés propitiatoires de la vengeance sans-culottière.

En nos temps bénis de progrès, de « care », de « soft » et de « cool », on n’élimine plus physiquement, ou peu s’en faut. Parce que nous ne sommes plus les barbares de jadis, nous tuons de manière plus… civilisée, en condamnant les proies au bannissement et à l’ostracisme social. En attendant - suprême raffinement de notre époque si joyeusement connectée - qu’elles soient purement et simplement éradiquées de la surface de la Terre.

Alors, la loi de Lynch serait-elle devenue le nouveau code de l’honneur des voyous banlocalisés ?
C’est ainsi qu’on apprend que la photographie du fonctionnaire de police qui aurait abattu le très pacifique multirécidiviste Aboubakar Fofana (objet d’un mandat d’arrêt), suite à un contrôle d’identité auquel l’intéressé aurait violemment tenté de se soustraire dans le quartier de Breil à Nantes, ce mardi 3 juillet, circule en boucle sur Internet. Le cliché, parfois légendé en des termes orduriers, s’accompagne également d’exhortations au meurtre du CRS placé en garde à vue.

Clouées au pilori par les médias gauchisants, très mollement soutenues par un pouvoir politique qui n’entend pas s’aliéner les banlieues allogénisées, les forces de l’ordre sont littéralement traînées dans la boue des cités racailleuses qui, au mépris de l’autorité de l’État – qu’ils conchient à proportion de sa faiblesse –, n’hésitent pas à imposer leur propre loi. Celle de la jungle.

En dépit de ses discours châtiés et de sa mine de jeune premier, le président de la République, par son assourdissant silence sur ces deux faits majeurs très rapprochés que sont l’évasion spectaculaire de Redoine Faïd et les émeutes nantaises, démontre qu’à l’instar de ses devanciers, il n’occupe que le seul ministère de l’aboulie et de la parole creuse, le Premier ministre et son ministre de l’Intérieur n’étant pas en reste non plus dans celui de l’incurie et des bras ballants.

Quand la bobo Johanna Rolland, maire PS de Nantes, déclare que ses "premières pensées vont à ce jeune homme mort, à sa famille, à tous les habitants de ce quartier, de nos quartiers", l’on s’interroge sur le degré de loyauté de certains élus à l’égard de nos institutions, d’autant que le maire est, légalement, officier de police judiciaire.

Bref, il semble s’instaurer en France un détestable climat à la fois d’impunité pour la voyoucratie et de culpabilité systématique des forces de l’ordre. On se souviendra, par exemple, qu’en mars 2017, un policier avait été condamné à cinq ans de prison avec sursis pour avoir tué d’une balle dans le dos Amine Bentounsi recherché pour des faits de braquage, à Noisy-le-Sec, en avril 2012.

Bref, on l’aura compris : la légitime défense a changé de camp. De l’autre côté des périph’ et des tours d’immeubles branchées sur Al Jazeera, c’est la légitime défonce des flics de France !

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06 juillet 2018 à 8:54

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