François Fillon, qui partait largement favori, a finalement commencé la course à la présidentielle avec un lourd handicap. Après être resté longtemps au creux de la vague, il commence, semble-t-il, à remonter la pente et prendre son élan. Mais à quel prix ?

S’il fut préféré à Alain Juppé, c’est que le maire de Bordeaux, comme il le fait dans sa municipalité, pratique le grand écart pour élargir son électorat.

Mais François Fillon n’aurait-il pas tendance à l’imiter ? D’un côté, il laisse entendre que François Baroin pourrait être son Premier ministre. De l’autre, il n’exclut pas que des membres de Sens commun participent à son gouvernement. Le mariage de la carpe et du lapin. Résultat prévisible ? L’échec du couple, le divorce ou un salmigondis indigeste dont on ne reconnaîtra plus les ingrédients.

Ce week-end de Pâques, le candidat de la droite a choisi de se rendre au Puy-en-Velay. Il y a célébré les racines chrétiennes et l’identité de la France : "Notre pays, c’est des paysages, des traditions, une langue, une littérature, une culture, un drapeau, des institutions, des valeurs, des souvenirs partagés."

Il est même monté jusqu’à la statue de la Vierge couronnée d’étoiles, qui porte l'Enfant Jésus sur son bras droit. Peut-être par conviction. Surtout parce qu’il cherchait les voix de la « droite dure » et conservatrice qui ont permis à Laurent Wauquiez de l’emporter aux régionales.

Mais ce soutien est-il conciliable avec celui d’autres personnalités, comme Xavier Bertrand ou Christian Estrosi, qui ont été élus grâce au désistement en leur faveur des candidats du Parti socialiste ?

Les cyniques diront qu’il faut rassembler à tout prix : le plus important, c’est d’être élu. François Fillon, il est vrai, n’a sans doute pas d’autre moyen de se qualifier au second tour que de quérir des suffrages à la droite de la droite et à la gauche de la droite. Il espère maintenir un certain équilibre mais risque fort de tomber si ses deux jambes ne vont pas dans la même direction.

Peut-être faut-il avoir l’esprit politicien et l’échine bien souple pour ne pas être gêné par de telles tractations et combines, fussent-elles efficaces ?

Au demeurant, elles n’auraient pas manqué à gauche si, d’aventure, elle avait présenté un candidat commun. Quant à Emmanuel Macron, il excelle dans l’exercice.

Réunir sous la même bannière Robert Hue et Alain Madelin, Gérard Collomb et Daniel Cohn-Bendit, Pierre Bergé et Alain Minc, d’anciens ministres de gauche et d’anciens ministres de droite, recevoir le soutien de Manuel Valls et, à demi-mot, celui de François Hollande, quand on prétend incarner le renouveau, c’est préparer un cocktail imbuvable ou une lice où de vieux crabes se déchireront avec leurs pinces.

Tous ces politiciens ont le choix entre ratisser large, pour essayer de l’emporter, ou défendre sincèrement leurs convictions, avec le risque de perdre. On peut comprendre, dans ces conditions, que de nombreux Français soient tentés par des candidats plus radicaux qui, quoi qu’on pense de leur programme, ont au moins le mérite de la cohérence.

Que devient la démocratie dans une telle conjoncture ? Elle est corrompue par ceux-là mêmes qui prétendent la défendre. Si l’on ne veut pas la réduire à un simulacre, si l’on veut lui redonner quelque authenticité, si l’on veut la revivifier, il faut d’urgence en revoir les formes et le fonctionnement.

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17 avril 2017 à 21:14

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