À bas l’égalité !

Il y a deux siècles, des révolutionnaires ont écrit : "Les hommes naissent… égaux en droits." Depuis quelques décennies, on traduit : "Les hommes meurent… égaux en biens." C’est alors la confusion : sainte Égalite est mise à tous les plats, enfin, à tous les brouets que ces gâte-sauce de forcenés de l’égalité, féministes en tête, s’ingénient à touiller dans leurs partiales officines perfusées d’argent public. En 2024, les Jeux olympiques auront lieu à Paris : au nom de l’Égalité, les femmes et les hommes vont-ils concourir le 100 mètres coude à coude ? Ce devrait être LA revendication absolue des égalitaristes fanatiques ; tout le reste est discriminatoire, officialisant une différence naturelle qui bafoue l’égalité.

Il n’y a pas que le sport, hélas ! Égaux, les élèves : donc, donnons le bac à tout le monde. Égaux, les travailleurs : donc, supprimons tout ce qui, de près ou de loin, s’apparente à la reconnaissance du mérite. Égaux, les mots : donc, torturons la grammaire pour que le masculin ne l’emporte plus sur le féminin.

Et ça marche ! Des gens se disent : « C’est vrai, ça ! J’suis pas égal avec Machin ! » Et on sort les banderoles, et on réclame « son » droit d’être égal avec Machin ! Ainsi, petit à petit, on fabrique des hordes de mécontents, de frustrés, d’envieux.

On voit bien qu’à force de brandir cette Égalité tout le temps, partout, pour tous, on obtient des résultats idiots : l’écriture inclusive, les « journées du matrimoine », la mise à l’index de La Belle au bois dormant, où le prince charmant, qui l’embrasse sans son consentement, fait figure d’obsédé sexuel ! Les politiques s’en mêlent, qui créent des ministères à l’« Égalité entre les hommes et les femmes » en sachant pertinemment – j’espère pour eux – que cette égalité est une utopie, un leurre, un attrape-gogos.

Égal, dit le Larousse, c’est "semblable en nature, en qualité, en quantité, en valeur". Synonyme : "Identique, pareil". Les femmes entre elles ne sont déjà ni identiques ni semblables ; les hommes non plus, du reste ! Pas plus que les frères et sœurs d’une même famille. Alors, imaginez l’égalité entre une femme et un homme ! Arrêtons avec ces chimères démagogiques.

La bonne notion, la seule, la vraie, celle qui ne fera jamais polémique, celle qui colle à la réalité des situations, celle que personne ne peut raisonnablement mettre en doute, celle qu’il convient de promouvoir ici et partout, aujourd’hui et tout le temps, c’est l’équivalence. Fondée sur la valeur personnelle des êtres (« -valence »), appuyée sur leur potentiel, respectueuse des spécificités de chacun, éloignée des comparaisons jalouses et stériles, porteuse de justice (« équi- »), l’équivalence devrait faire son entrée dans le vocabulaire des gens, dans leur esprit et surtout dans les plans d’action de nos politiques.

Et puis, un « ministère à l’Équivalence des femmes et des hommes », ça aurait de l’allure, non ? On a déjà jeté « Fraternité » pour le remplacer pas « Solidarité », on peut pousser l’audace jusqu’à éjecter l’Égalité dévoyée et accueillir, à sa place, Sa Majesté l’« Équivalence ».

Yannik Chauvin
Yannik Chauvin
Docteur en droit, écrivain, compositeur

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