100 ans de la révolution russe : la répétition générale de 1905

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Les causes de la révolution russe du 7 novembre 1917 (25 octobre dans le calendrier julien) sont connues et elles font toujours l’objet de débats passionnés entre historiens. Bien entendu, elles sont à la fois politiques, sociologiques, économiques, conjoncturelles et structurelles, mais aussi internationales et militaires.

En réalité, la révolution d’Octobre prend souche douze auparavant, dès le 22 janvier 1905 (9 janvier au calendrien julien), avec la fusillade du Dimanche rouge. À Saint-Pétersbourg, le tsar Nicolas II fait tirer l’armée sur quelques 200.000 ouvriers grévistes qui veulent lui porter une pétition. Ils demandent, sous l’influence des mouvements bolcheviques et anarchistes, plus de libertés, notamment syndicale, une réforme agraire, la journée de travail à huit heures, le vote au suffrage universel… On relève plusieurs centaines de morts et plusieurs milliers de blessés. Le mouvement se radicalise, après la mutinerie du cuirassé Potemkine (juin 1905) et après la défaite militaire des armées russes en Corée et en Mandchourie face aux armées japonaises (septembre 1905). Profitant de cette baisse de popularité du tsar, la population revient à la charge et réclame une Constitution, une Douma et les libertés. Dans le même temps, les activistes du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR) et le soviet ouvrier de Saint-Pétersbourg fomentent une grande grève générale en octobre 1905 qui paralyse le pays. Au point que l’armée elle-même ne peut intervenir faute de moyens.

Pour calmer le jeu, Nicolas II lâche du lest. Il nomme son ancien ministre des Finances, Serge Witte (1849-1915) comme Premier ministre. Ce dernier fait signer au tsar le manifeste du 17 octobre qui accorde quelques libertés : conscience, parole, réunion, association. Ce manifeste entérine le fait que les futures élections de la Douma s’effectueront au suffrage universel et que la monarchie russe devient constitutionnelle. Les révoltes, notamment paysannes et rurales, n’en continuent pas moins, même si elles finissent par s’estomper après l’action du gouvernement. Car le Premier ministre Serge Witte fait arrêter les dirigeants de l'Union paysanne le 27 novembre et les membres du soviet ouvrier de Saint-Pétersbourg, dont Léon Trotski (1879-1940), le 16 décembre. Les agitations reprennent en décembre 1905 et janvier 1906. Les consignes du gouvernement sont claires : « Pas de prisonniers », « Ne pas ménager les cartouches » ! De l’opposition entre, d’un côté, les ouvriers et, de l’autre, la police et l’armée, on relève plus d’un millier de morts. Le peuple entonne le "Chant des martyrs" : "Vous êtes tombés pour tous ceux qui ont faim, tous ceux qu’on méprise et opprime…" Malgré quelques remous sporadiques, le gouvernement réussit à maintenir l’ordre. Les élections de la première Douma ont lieu les 27 avril et 10 mai 1906. Elles donnent la victoire au parti libéral des constitutionnels-démocrates (KD).

Mais sentant qu’il reprend politiquement la main, Nicolas II refuse de nommer un gouvernement issu de cette majorité parlementaire. Il n’a pas pris conscience que cette révolution de 1905 a formé par l’expérience les cadres révolutionnaires. Elle a éprouvé la justesse de la tactique définie par les bolcheviks : grèves politiques de masse, organisation de soviets d’ouvriers et de paysans, mobilisation des masses en vue de l’insurrection. C’est ainsi que Lénine écrira plus tard : "Sans la répétition générale de 1905, notre victoire de 1917 eût été impossible."

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 20:14.

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